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autres considérations que nous avons invoquées nous permettent donc de dire que l’auteur de la chanson, telle que nous la publions, avait sous les yeux un poëme primitif en vers de 10 syllabes, dont il a changé le commencement, voulant le faire rentrer dans le cadre des chansons de geste du temps, et employer les formules ordinaires (injures à l’adresse des autres jongleurs, appel à l’attention des auditeurs, etc.), dont il a conservé une partie, dont il a imité une autre, se réservant dans le cours et à la fin de l’œuvre la faculté de modifier et d’allonger ce qui lui conviendrait, et surtout d’ajouter ce qui pourrait plaire au public de l’époque.

Nous savons déjà que ce remanieur était picard, l’étude de la langue ne laisse aucun doute à cet égard ; nous croyons aussi qu’il n’est guère possible d’hésiter sur la nationalité de l’auteur du poëme décasyllabique. Cet auteur était évidemment natif du centre de la France ; la connaissance qu’il montre de l’Orléanais et du Berry, les détails dans lesquels il se complaît en parlant de Poitiers et d’Orléans, l’exactitude absolue de l’itinéraire de notre héros dans cette partie de la France, l’identification possible de toutes les localités, tout cela, joint au caractère du dialecte qui peut appartenir à ces pays, nous conduit à considérer l’auteur du poëme décasyllabique comme un habitant du centre de la France. Mais ce poëte n’a-t-il pas eu lui-même sous les yeux une chanson plus ancienne encore, qu’il aurait le premier imitée ? C’est ici que se pose la question de l’Aiol provençal.

Ce poëme provençal dont Fauriel a supposé l’existence, puisqu’il a rangé l’Aiol au nombre des chansons proven-