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Près du foyer, étend le bras vers sa casquette…
Mais arrêtant sa main, Jeanne, pâle, inquiète,
Lui dit : « Tu n’iras pas ! — Et pourquoi s’il te plaît ?
— Tu n’iras pas ! — Je suis garde de la forêt !
C’est mon devoir : j’irai ! — N’y va pas, si tu m’aimes…
— D’où te viennent ce trouble et ces frayeurs extrêmes ?
— J’ai peur ! — Folle ! Pourquoi trembler comme cela ?
Depuis cinq ans passés je fais ce métier-là ;
Chaque soir dans les bois je vais faire ma ronde,
Et je braverais tous les braconniers du monde !
— Pierre, je t’en supplie ! — Allons, assez ! Je veux
Faire ce que je dois et corriger ces gueux.
Sois tranquille, d’ailleurs ; pour se laisser surprendre
Les maudits sont trop fins ! Ami, veuillez m’attendre
Avec Jeanne un quart d’heure et je suis de retour.
Psitt ! Phanor ! Au revoir, Jeannette, mon amour ! »

Son fusil sous le bras, sifflant un air de chasse,
Il part ; son pas hardi résonne sur la glace ;
Tous les deux aux carreaux nous le suivons de l’œil ;
La nuit s’étant sur lui comme un voile de deuil ;