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Lors, s’échappant du cœur, viennent en sa pensée

Les souvenirs brillants de sa gloire passée ;
Il revoit ses combats, ses luttes, les pays
Que pour son Empereur sa bravoure a conquis ;
Il revoit, gracieuse et triste fiancée,
Aude, sœur d’Olivier, qu’en France il a laissée ;
Il revoit son pays, sa famille, et surtout,
Surtout son Empereur, majestueux, debout,
Avec son chef fleuri, sa barbe qui l’inonde,
Dans une main l'épée et dans l’autre le monde !
Puis, il fait sa prière en chevalier pieux,
Dit son « meâ culpâ », soulève vers les cieux
Le gant de sa main droite… et, dans une auréole,
Son âme de soldat au Paradis s’envole.

Immense est la montagne et le défilé noir.
Le soleil s’est éteint, rouge ; l’ombre du soir
S’étendant sur ces lieux à l’aspect âpre et rude
Jette une sombre horreur sur cette solitude.
Pas une étoile au ciel ; sur la terre, aucun bruit :
Rien que la grande voix du torrent dans la nuit,