pensé à rien du tout. Un spirituel et habile journaliste, M. Jules Huret, a fait une enquête sur le nouveau mouvement littéraire en France, et obtenu de ses principaux représentants des renseignements qui nous font connaître sufisamment le sens qu’ils attachent ou prétendent attacher aux expressions de leur programme[1]. Je vais reproduire ici quelques-unes de ces déclarations. Ce qu’est le symbolisme, elles ne nous l’apprendront d’ailleurs pas ; mais elles nous permettront de pénétrer dans la pensée des symbolistes.
M. Stéphane Mallarmé, le chef de la troupe symboliste le moins contesté par les adeptes, s’exprime en ces termes : « Nommer un objet, c’est supprimer les trois quarts de la jouissance du poème qui est faite du bonheur de deviner peu à peu ; le suggérer, voilà le rêve. C’est le parfait usage de ce mystère qui constitue le symbole ; évoquer petit à petit un objet pour montrer un état d’âme, ou, inversement, choisir un objet et en dégager un état d’âme par une série de déchiffrements ».
Si le lecteur ne comprend pas immédiatement cet enchaînement de mots obscurs, qu’il ne s’arrête pas à déchiffrer l’énigme. Je traduirai plus tard le balbutiement de ce faible d’esprit dans la langue compréhensible des hommes sains.
M. Paul Verlaine, un autre grand-prêtre de la secte, fait la réponse que voici :
« C’est moi qui, en 1885, ai réclamé pour nous le nom de symbolistes. Les parnassiens et la plupart des
- ↑ Jules Huret, Enquête sur l'évolution littéraire. Paris, 1891.