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que Noé, le saint homme, auquel nous devons tous avoir tant d’obligation et de reconnaissance de ce qu’il nous planta la vigne, dont nous vient cette nectarique, délicieuse, précieuse, céleste, joyeuse et déifique liqueur qu’on nomme le piot, fut trompé en le buvant, car il ignorait sa grande vertu et puissance, semblablement les hommes et femmes de ce temps mangeaient avec grand plaisir de ce beau et gros fruit, mais accidents bien divers leur en advinrent : à tous survint au corps une enflure très-horrible, mais non à tous en un même lieu. Car aucuns enflaient par le ventre et le ventre leur devenait comme une grosse tonne, desquels il est écrit : ventrem omnipotentem ; et ils furent tous gens de bien et bons raillards. Et de cette race naquirent saint Pansard et Mardigras.

Les autres enflaient par les épaules, et tant étaient bossus qu’on les appelait montifères, c’est-à-dire porte-montagnes ; et vous en voyez encore par le monde en divers sexes et dignités. Et de cette race issit Esopet, duquel vous avez les beaux faits et dits par écrit.