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que de boire, et il le nommait son Guoitrou. Le geai, en furie martiale, rompit sa cage et se joignit aux geais passants. Un barbier voisin, nommé Bavhard, avait une pie privée bien galante ; elle augmenta de sa personne le nombre des pies et les suivit au combat. Voici des choses grandes et paradoxales, vraies toutefois, vues et avérées. Notez bien tout, qu’en advint-il ? quelle en fut la fin ? Ce qu’il en advint, bonnes gens ! cas merveilleux. Près la croix de Malcbara la bataille fut si furieuse que c’est horreur seulement d’y penser ; la fin fut que les pies perdirent la bataille, et furent félonnement occises, jusqu’au nombre de 2,589,362,109 sans les femmes et petits enfants, c’est-à-dire sans les femelles et petits piaux, vous entendez cela. Les geais restèrent victorieux, non toutefois sans perte de plusieurs de leurs bons soldats, grande douleur pour tout le pays. Les Bretons sont gens, vous le savez, mais s’ils eussent compris ce prodige, il eussent facilement connu que le malheur serait de leur côté, car les queues des pies ont la forme de leurs hermines, les geais ont en leur plumage quelque ressemblance avec les armes de France.

Or, le Guoitrou, trois jours après, revint tout hallebrené et fâché de ces guerres, ayant un œil poché ; toutefois, peu d’heures après qu’il eut repu à son ordinaire, il se remit en bon sens. Le plaisant peuple et les écoliers d’Angers, par bandes, accouraient voir Guoi-