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sent et contractant, et ils restent dans leurs maisons, privés de leurs filles tant aimées, le père maudissant le jour et l’heure de ses propres noces, et la mère regrettant de n’avoir pas avorté en ce malheureux et triste enfantement. Ils finissent ainsi dans les pleurs et les lamentations une vie qu’il était raisonnable de voir s’achever dans la joie.

Quelques-uns, cependant, trouvant le rufian accompagné de son myste, ensemble conspirant et subornant leurs filles, les ont sur le champ mis en pièces et massacrés, jetant leurs corps aux loups et aux corbeaux dans la plaine. Auquel acte viril et chevaleresque les symmistes taupetiers ont frémi et lamenté misérablement et formé des plaintes horribles, puis requis à temps le bras séculier et justice politique, insistant fièrement et soutenant que de tels cas devait être faite exemplaire punition. Mais ni en équité naturelle, ni en droit des gens, ni en loi quelconque on n’a trouvé rubrique, paragraphe, point, ni titre par lequel fut peine ou punition à tel fait attribuée, la raison s’y opposant et nature y répugnant, car nul honnête homme n’est en ce monde qui naturellement et par raison ne soit plus troublé et mis hors de lui-même en apprenant la nouvelle du rapt et déshonneur de sa fille qu’en apprenant la nouvelle de sa mort. Or un chacun trouvant sur le fait le meurtrier assassinant sa fille dans un guet-apens, le peut par raison et le doit par