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et de correction ; mais cette profanation n’est rien auprès de celle des philologues, qui ont brodé sur ce canevas délicat l’insipide fatras de leurs scholies pédantesques. Eh ! qu’importe, grand Dieu ! que cet admirable Amyot ait suivi de plus ou moins près le sens douteux du meilleur manuscrit de Longus, et que la loupe philologique de M. Lancelot ait plus ou moins bien réussi à démêler ces vétilles verbales ! Ce n’est vraiment pas de cela qu’il est question, quand on a le bonheur de reproduire la traduction d’Amyot. Elle n’avoit pas besoin d’être savante. Le roman de Longus est un livre assez joli en grec, et voilà tout. La version d’Amyot, qui vaut cent fois mieux, est un chef-d’œuvre inimitable de langue.

L’édition des Essais, donnée par M. Naigeon, et qui est modifiée d’après des notes authentiques, mais imparfaites et abandonnées de Montaigne, a l’avantage de reproduire fidèlement son orthographe, que M. Coste et ses pareils avoient défigurée avec une sollicitude barbare ; mais si la lexicographie de M. Naigeon a quelque mérite aux yeux de notre vieille littérature, sa philosophie ne vaut pas mieux que sa critique. La prétention d’un pédant qui fait Montaigne matérialiste et athée, parce qu’il se croit, lui pédant, athée et matérialiste, est une des monomanies les mieux caractérisées de notre histoire littéraire. On ne peut mettre au-dessus de cela, en fait de ridicule et d’absurdité, que le Commentaire des Pensées de Pascal par Condorcet, avec de prétendues notes de Voltaire. — Les auteurs du seizième siècle auxquels le dix-huitième a fait les honneurs de la réimpression, exigent donc des réimpressions nouvelles, qui ne seront jamais définitives, tant qu’on ne les aura pas émondées, autant que faire se peut, des mauvaises et prétentieuses interprétations de nos critiques, et de la mauvaise et ridicule orthographe de nos imprimeurs.

Le Cymbalum mundi de Desperriers a été réimprimé trois fois de 1711 à 1753, mais plutôt par égard pour sa rareté que pour son mérite, et de médiocres vignettes de Bernard Picart lui ont valu la plus grande partie de