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ter dans les sociétés qui finissent et dans les langues qui meurent.

La tangente de notre monde civilisé, sur laquelle je me suis depuis long-temps juché en désespoir de cause, n’est pas toutefois tellement étrangère à ses révolutions, que je n’y participe au moins par quelques sympathies. J’adhère sincèrement à l’élan passionné qui entraîne quelques-uns de mes jeunes amis (je ne parle pas des savants profès que d’autres suffrages couronnent, et qui n’attendent point le mien) à l’exploration de ces chartes vénérables de notre histoire, de ces incunables précieux de notre langage, trésor jusqu’ici méconnu qui étoit échu aux vers comme un patrimoine. Grâces soient rendues de leurs admirables entreprises à M. Crapelet, à M. Techener, à M. Silvestre ; aux dignes imprimeurs de Paris, de Lyon et de Chartres, qui ont compris ce mouvement comme l’auroient compris leurs fameux prédécesseurs, les Vérard, les Galliot du Pré, les Dolet. Grâces soient rendues surtout aux études laborieuses et ardentes de tant de jeunes esprits, qui se sont dévoués à ces pénibles explorations en mépris de la réputation hostile des feuilletons et de la vogue éphémère des brochures ; à M. Paulin Paris, à M. Leroux de Lincy, qui nous ont si habilement dévoilé les secrets de l’épopée intermédiaire ; à M. de Terrebasse, qui reproduit si religieusement le texte de nos chroniques ; à M. Lacroix, qui les rajeunit dans des compositions si spirituelles ; à mon savant frère Charles Weiss, qui les fouille et les éclaircit aujourd’hui dans un silence fécond ; à M. Francisque Michel, à M. Jubinal, à M. Trébutien, à cet essaim studieux tout entier qui compose son miel dans la poussière des chartes, et dont la moitié vient d’être sacrifiée par la chance capricieuse du concours à l’ultimatum parcimonieux du budget. Pauvres enfants, amoureux d’érudition et de bon savoir, qui avoient renoncé à toutes les illusions de leur âge, aux illusions même d’un âge plus avancé, celles des succès faciles et des fausses gloires, pour des travaux d’abnégation et de courage ; et qu’un arrêt brutal vient