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spéciale peut être un livre fort curieux en soi, et quelquefois un livre indispensable. C’est un travail qui exige beaucoup d’exactitude et beaucoup de méthode, c’est-à-dire de la conscience et du jugement, deux qualités qui ne sont pas tellement communes qu’on puisse les négliger sans injustice. La civilisation est d’ailleurs assez avancée pour songer sérieusement à son inventaire, et c’est le moment pour elle d’être plus libérale de son estime envers les jurés-priseurs qui vont tenir registre de ses vieilleries. Il y aura bien du rebut !

Je n’ai pas voulu parler ici de certaines bibliographies spéciales, étrangères ou à notre époque ou à notre langue, mais qui relèvent plutôt de la bibliographie d’amateur que de la biographie de profession, quoiqu’elle ne lui ait pas nui, telles que la Bibliothèque dramatique de La Vallière, les Novellieri de Borromeo, les Textes de la Crusca de M. Gamba, et les Épopées romanesques de M. Melzi, livres plus ou moins importants dans leur espèce, et les deux derniers excellents. Je me suis attaché au catalogue de vente publique dans toute sa simplicité, quand il représente une bibliothèque spéciale, et qu’il est exécuté par un homme de savoir. Ainsi l’amateur des lettres classiques de l’antiquité ne peut se passer des catalogues de Maittaire, de Rewiezky et d’Askew ; celui des Voyages, du catalogue de Courtanvaux ; celui de la Botanique, du catalogue de Lhéritier. Quand on ne possède pas la Bibliothèque immense, incomplète, et cependant presque inexplorable du père Lelong, on ne sauroit se dispenser, pour pénétrer dans le dédale de l’histoire de France, de consulter les catalogues de Lancelot et de Fontetti. La philologie orientale, si nouvelle chez nous, au moins dans l’extension académique qu’elle y a prise depuis quelques années, n’a pas jusqu’ici de meilleur Manuel en France que le catalogue de M. Langlès, chef-d’œuvre d’ordre et de méthode dont quelques erreurs inévitables ne diminuent pas le mérite. Rien n’est plus capable que de pareils ouvrages de réhabiliter dans tout son éclat la dignité d’une noble industrie,