Page:Nodier - Dissertations philologiques et bibliographiques.djvu/26

Cette page a été validée par deux contributeurs.

car il n’y a que cela, en dernière analyse, qui mérite de vivre dans les élucubrations du savoir. Il n’est pas bien difficile de trouver un nouvel aspect aux choses que l’on observe ; il suffit, pour y réussir, de les considérer sous un aspect qui a été dédaigné de tout le monde, et qui méritait de l’être, parce qu’il n’offrait que de faux semblants et des apparences trompeuses. Voilà ce que les esprits superficiels prennent trop souvent pour des découvertes. Les vieux peuples ne sont pas appelés à être découvreurs, comme une folle présomption le leur persuade. Ce qu’ils croient inventer, c’est presque toujours ce que des peuples antérieurs ont rebuté par sagesse ou abandonné par dégoût. Leur mérite propre à eux, ce serait d’être graves et sensés, s’ils avaient su profiter de leur expérience et de leur âge.

Cet accessoire est grand, mon sujet est petit :


je ferai mieux d’y retourner.

Il ne faut pas conclure de ces préliminaires que je rejetterois impitoyablement les interprétations sophistiques et capricieuses qu’on a données du projet de quelques auteurs et du mystère de leurs compositions. Il faut admettre toutes les opinions pour être complet ; il faut les exprimer toutes pour être exact, mais il y a une mesure nécessaire à tenir dans le crédit qu’on leur accorde, et c’est cette mesure que je recommande à notre bibliographe, comme le seul moyen de rendre son travail aussi utile qu’intéressant. S’il se jetoit dans le vague des hypothèses, sans y porter les lumières d’une discussion libre de tout préjugé, il vaudroit mieux qu’il n’eût pas écrit. Assez de conjectures systématiques, assez d’erreurs comme cela.

Ainsi on ne doit pas nous faire grâce de cette vieille prévention classique des philologues, qui ont unanimement reconnu Néron dans le Trimalcion et dans l’Agamemnon du fameux Satyricon de Pétrone ; mais on fera justice de cette méprise ridicule qui n’a pas trompé le goût exquis de Voltaire, si peu versé d’ailleurs dans les bonnes études critiques. Il est très possible que Pétrone ait écrit beaucoup de choses