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térieurs au mont Gargano, en Apulie. Ils trouvèrent la ville de Salerne assiégée par une flotte de Sarrasins et déjà réduite à la dernière extrémité. Gaimard, le prince de la contrée, demande conseil à ces étrangers ; ceux-ci répondent en offrant le secours de leurs bras. Le jour même ils font une sortie ; ils jettent l’épouvante au milieu des Musulmans ; ils les obligent à remettre à la voile, et la ville de Salerne est ainsi délivrée par quarante chevaliers normands.

Ne demandez pas si la reconnaissance des habitans de Salerne fut acquise à nos pèlerins. Ils retournèrent dans leur Normandie comblés de présens, et firent de l’Italie les peintures les plus enivrantes. Ce fut à la même époque que Gislebert et ses quatre frères se dirigèrent vers la Pouille. On leur donna des châteaux à garder et des villes à conquérir sur les Grecs et sur les Sarrasins. Puis, en Normandie, le vieux Tancrède de Hauteville, ayant douze enfans vigoureux, affamés et amateurs d’aventures, envoya les trois aînés, Guillaume, Droon et Humphroi, sur la route qu’avait suivie Gislebert. À peine arrivés en Sicile, le prince de Salerne confia son gonfanon, c’est-à-dire le commandement de ses armées, à Guillaume. « Et à dire la vérité, remarque notre chronique, plus valut la hardiesce et la prouesce de ce petit de Normands, que la multitude de li Grec et la superbe de li Sarrasin. »

C’est ce Guillaume, surnommé Brachium Ferri, dont nos vieux rapsodes ont, à mon avis, chanté les aventures et constaté la renommée, sous le nom de Guillaume Fière-Brace. Le héros d’épopée et le héros d’histoire sont tous les deux chefs d’une famille nombreuse ; tous les deux fils d’un baron plus noble que riche ; tous les deux reçoivent de leur père l’ordre d’aller chercher fortune ailleurs ; tous les deux vont en Italie, défendent le pape, suppléent à la lâcheté des Lombards et mettent les Sarrasins en fuite. Mais là s’arrête le parallèle. L’histoire parle d’une manière fort concise de