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jeux de cartes, qui devinrent populaires en tombant à bas prix. La ville d’Ulm faisait un tel commerce de cartes, qu’on les envoyait par ballots en Italie et en Sicile pour les échanger contre des épices et des marchandises. Le peintre en cartes s’appelait briefmahler. Il est certain que le lansquenet est né en Allemagne, ainsi que le piquet en France. — Le caractère espagnol, toujours fidèle aux distinctions de rangs et d’états, se fit sentir dans la substitution des copas, espadas, dineros et bastos, aux quatre couleurs du jeu de cartes français, dans lequel on n’avait fait entrer que des armes : les calices (copas) des ecclésiastiques, les épées (espadas) des nobles, les deniers (dineros) des marchands, et les bâtons (bastos) des cultivateurs, marquèrent les quatre états du peuple en Espagne. On a voulu mal à propos interpréter de la même manière les couleurs de nos cartes, en supposant que le cœur représente le clergé, qui siége au chœur ; le pique, la noblesse, qui commande les armées ; le carreau, la bourgeoisie, à cause du pavé des villes, et le trèfle, les habitans des campagnes. — En dépit des ordonnances civiles et cléricales qui ont fréquemment renouvelé la prohibition des cartes à jouer, ce jeu, varié par d’innombrables combinaisons, s’est toujours maintenu à la tête des jeux avec les échecs et les dames. Le lansquenet, le piquet, la triomphe, la prime, le flux, le trente-et-un, la condemnade, le mariage et une foule d’autres eurent successivement la vogue dans