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Lahire, dit-on, ou plutôt un servant d’armes, qui s’est personnifié dans l’image du valet de trèfle sans se nommer, réforma ce jeu des tarots de manière à le mettre au rang des exercices militaires : le trèfle figurant la garde d’une épée, le carreau le fer carré d’une grosse flèche, le pique la lance d’une pertuisanne, le cœur la pointe d’un trait d’arbalète, étaient les armes et les compagnies armées ; les as, nom d’une monnaie ancienne, signifiaient l’argent pour la paie des troupes ; les quatre rois représentaient les quatre grandes monarchies, juive, grecque, romaine et française, car Charles VII, comme successeur de Charlemagne, pouvait prétendre à l’empire d’Occident ; David, Alexandre et César portaient aussi le manteau d’hermine et le sceptre fleurdelisé ; les quatre dames remplaçaient les quatre vertus des tarots, Judith au lieu de la force, Pallas au lieu de la justice, Rachel au lieu de la fortune, et Argine au lieu de la tempérance : cette Argine, anagramme de regina, doit être Marie d’Anjou, femme de Charles VII, recommandable par sa piété et sa douceur ; les quatre valets, ou varlets, représentaient la noblesse de France, depuis son époque héroïque jusqu’à la chevalerie : Hector de Troie, père de ce fabuleux Francus, qui passait pour le premier roi franc ; Ogier le Danois, l’un des pairs de Charlemagne ; Lahire, le plus brave capitaine de Charles VII, et le valet de trèfle, qui s’est mis en si vaillante compagnie en sa qualité d’inventeur ou de réformateur du jeu de cartes. Je