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Quand l’auroro fourrado en raoubo de sati,
Desfarouillo, sans brut, las portos del mati,
Lou poul canto de fret, et l’hiber en coulèro
Gèlo dins soun cami la gouto de l’ayguèro.
Mais lou Diou de la luts, alloungan son artel,
Part, tout rajen de fet dins lou char del Sourel ;
De sous rious enflamats escaouduro l’espaço,
Et fay foundre en passant et la nèjo et la glaço.
A sa douço calou, counten, rebiscoulat,
Marcho lou bobyatjur sul terren degelat…
Tandis qu’à soun quounoul la jouyno bourdilèro
Biro en se soureillan la punjento filèro,
Sous drolles al peril fan groussi lou grumel,
Et sul trol a siez bouts descargon lou fuzel.

Il faut en vérité qu’une école provinciale soit bien sûre de la perfection de son enseignement pour interdire à ses élèves la pratique d’un tel langage, et l’étude d’un tel modèle ! Cependant, si la délicatesse ombrageuse de nos puristes obtenoit jamais de la proscription des patois le résultat qu’elle en attend, je recommanderois humblement celui-ci au souvenir de mes illustres confrères de l’académie des inscriptions et belles-lettres, qui viennent d’attacher de hautes récompenses à l’exploration grammaticale de deux dialectes iroquois ; ces dialectes de la patrie ont aussi leur intérêt. Mais cela n’est pas pressé, la langue qui produit un poète comme Jasmin n’est pas encore une langue morte.

J’allongerois de beaucoup cette notice qui menace déjà d’être démesurément longue, si j’entreprenois de faire remarquer tout ce que renferme de beautés le passage que je viens de citer presque au hasard ; mais je ne saurois me défendre de m’arrêter un moment aux troisième et quatrième vers, parce qu’ils peuvent du moins se tourner littéralement en françois collégial, sans per-