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vous attester que M. Michaud, qui a oublié son article, n’en a point donné de plus complet.

Un seul mot sur Gaillard, qui avoit été valet de pied, et qui étoit devenu cocher, mais qui ne manquoit pas de littérature. Il avoit repris l’artifice commode et lucratif de Bluet d’Arbères, avec plus de tact et d’esprit, et ses lettres adulatrices aux belles dames de son temps sont assez passables pour des lettres de cocher et de valet de pied. Une chose qui le distingue des fous parasites, ses contemporains et ses émules, c’est son profond dédain pour la vénalité des muses. Quand il s’agit d’indépendance littéraire, ce palfrenier musqué qui vivoit de flatter, ne fait grâce à personne :

Corneille est excellent, mais il vend ses ouvrages.
Rotrou fait bien les vers, mais est poète à gages.

Les poésies de Gaillard parurent en 1634, et bienheureux qui les a, car on ne les trouve guère. Il s’en falloit d’un an que le grand Corneille n’eût fait pressentir son génie dans Médée, par quelques éclairs sublimes. J’ai cité ce passage parce qu’il est le premier peut-être où la littérature qui couroit alors ait fait mention de Corneille, et puis parce qu’il n’est pas inutile de faire voir dans l’occasion comment les grands hommes qui débutent sont traités par les laquais.

Cette galerie de fous, je le répète, seroit amusante à parcourir si on en avoit le temps ; mais nous sommes trop préoccupés aujourd’hui par des folies sérieuses, qui sont la honte de l’humanité quand elles n’en sont pas l’effroi, pour accorder une attention soutenue à des aberrations sans conséquence et sans danger qui n’appellent que le rire de la pitié. Loin d’augmenter mon catalogue à peine ouvert, j’en retrancherai au contraire un article avant de clorre celui-ci.

Dans ses estimations cavalières de tout ce que la lit-