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neille. Quant à La Fontaine, on comprend à peine qu’il ait pris couleur dans ce procès déplorable.

Le second Factum est d’un autre style. C’est un libelle sanglant imprégné de tout le fiel des haines personnelles, mais il faut remarquer que, dans l’intervalle, l’Académie-Françoise avoit retranché Furetière du nombre de ses membres ; ce qui étoit un grand tort si elle en avoit le droit, et un tort beaucoup plus grand, si elle ne l’avoit pas. Tallemant des Réaux, de cynique mémoire, n’a été nulle part plus insolent et plus brutal que Furetière. Il y a pourtant dans cet écrit bien des faits particuliers d’histoire littéraire qui auroient dû lui donner dans le commerce de la librairie plus d’importance et de valeur qu’il n’en a communément. Le portrait de Quinault est comique par le choix des images et des mots qui font allusion à la profession de son père : « Le sieur Quinault a quelque mérite personnel ; c’est la meilleure pâte d’homme que Dieu ait jamais fait ; il oublie généreusement les outrages qu’il a soufferts de ses ennemis, et il ne lui en reste aucun levain sur le cœur. Il ne s’ensuit pas pour cela qu’il ait grande autorité dans la littérature ; il a eu pour son partage quatre ou cinq cents mots de la langue, qu’il blutte, qu’il ressasse, et qu’il pétrit le mieux qu’il peut. » Cette plaisanterie pourroit être d’un meilleur ton, mais elle est malicieuse et spirituelle. Dans les autres, Furetière, peut-être justement aigri, va jusques à la cruauté. Vers la fin, il examine sérieusement le droit que l’Académie a eu de l’expulser de son sein, et dans cette discussion qui a été probablement éclairée des lumières d’un savant avocat, il reprend tous ses avantages. Il est impossible de faire valoir des raisons plus péremptoires dans le fond, avec plus de torts dans la forme.

Le troisième factum de Furetière, à la date de 1688,