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chose à reprendre pour un écolier. C’est la fatalité des langues et des Dictionnaires qui le veut ainsi.

Le Dictionnaire de l’Académie-Françoise fut donc critiqué, il le fut tandis qu’on le faisoit encore, et bien des années avant d’avoir paru. Il le fut souvent avec justice, parce que c’est en ce genre surtout, comme je viens de le dire, que la critique est aisée ; toujours avec amertume, parce que l’aristocratie littéraire de l’Académie irritoit les passions et révoltoit l’orgueil d’un monde d’écrivains qui n’en étoient pas, quoique certains fussent très dignes d’en être. C’est de cette polémique de mots que je me propose aujourd’hui d’entretenir mes rares lecteurs en faveur de ceux qui, comme moi, prennent un intérêt de caprice ou d’habitude à nos vieilleries classiques. Chacun a son goût, et je ne suis pas sûr qu’on ait découvert de nos jours des moyens beaucoup plus agréables de passer le temps.

Le plus ancien de ces livrets, bons ou mauvais, est la Comédie des Académistes de Saint-Évremont, qui a été réimprimée dans ses Œuvres, mais dont l’édition de 1646, citée par M. Barbier, et celle de 1650, sont devenues presque introuvables. Cette Comédie, où il ne faut pas chercher une comédie, a été mise par Pelisson au rang des farces, et Pelisson lui a fait plus d’honneur qu’elle n’en mérite, car il y a des farces délicieuses. La Comédie de Saint-Évremont est une composition assez insipide, où l’on remarque cependant çà et là des traits de satire passablement amusants. Cette verve de saillies est toutefois bien loin de celle qui anime la plaisante Conversation du maréchal d’Hocquincourt et du père Canaye, et quoique Voltaire soit un fort méchant guide en histoire littéraire, il ne me faudroit point d’autre preuve pour me ranger à l’hypothèse en vertu de laquelle il restitue ce petit chef-d’œuvre à Charleval.