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Remortier. Ce livret en rimes fort maussades a pour titre un quatrain qui suffira pour donner une idée du talent poétique de l’auteur :

Le Discours demonstrant sans feincte
Comme maints Pions font leur plainte,
Et les Tauernes desbauchez
Parquoy Tauerniers sont faschez.


Aussi mon savant ami, M. Brunet, n’hésite point à le ranger parmi les plus plats et les plus insignifiants des rogatons de son espèce, et c’est ce qu’il auroit pu dire d’une manière plus générale, et peut-être plus juste encore, de presque toutes les rapsodies dont nous sommes si fort entichés l’un et l’autre. Plat est incontestablement le mot propre ; il n’y en a point de plus caractéristique à mettre à sa place. Quant à insignifiant, je n’en saurois tout à fait convenir aujourd’hui pour l’honneur de mon article. Mais, d’une autre part, son insigne rareté lui a fait obtenir aux yeux des amateurs une valeur qui excède de beaucoup celle des livres les mieux écrits et les mieux pensés, puisque de trente-un francs qu’il s’est vendu en 1815, il vient de s’élever à Londres jusqu’au prix de six guinées, et qu’on n’obtiendra plus le même exemplaire du libraire Techener, notre gracieux éditeur, à moins d’une bagatelle de seize ou dix-huit pistoles, en attendant qu’il retourne à son prix originaire et rationnel d’un sou, ce qui arrivera probablement quand les poétastres de ce temps-ci vaudront deux cents francs à leur tour. Habent sua fata libelli.

Pendant que je suis sur cette question bachique de tabernis, cauponis et popinis, à laquelle je ne me propose pas de revenir, croiriez-vous qu’il ne tient qu’à moi de vous fournir des renseignements presque aussi précis sur la position et sur le nom des principales tavernes qui florissoient à Paris en l’an de grâce et de plai-