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le blason nous l’a conservée dans les armoiries du moyen-âge. C’est ainsi que l’Humble Espérant avoit pour cri d’armes dans ses joûtes poétiques : Espérant mieulx ! Clément Marot, La mort n’y mord, et il ne se trompait point sur sa renommée à venir ; Herberay des Essarts, Acuerdo Olvido (souvenance et oubli) ; et celui-ci embrassoit dans ses prévisions plus timides, les deux destinées du poète. La dernière partie de sa légende lui est restée en toute propriété. Elle convient merveilleusement au plus grand nombre de ses contemporains et de ses successeurs.

Quelquefois par un raffinement qui les rendoit plus diaphanes, la devise ou le surnom renfermoit le nom même dans les replis d’un anagramme, comme Vrai prélude ou Le vrai perdu, Bel art d’ange et Bonté n’y croist, où l’on retrouve aisément Pierre Duval, Albel d’Argent et Benoist du Troncy. L’anagramme servoit plus souvent encore à traduire simplement le nom d’un auteur sous un nom factice qui avoit l’attrait de l’énigme sans en avoir la difficulté, ainsi que nous l’avons vu en Nicolas Denisot, devenu Conte d’Alsinois. Il n’y a en effet rien de moins embarrassant quand il s’agit d’un écrivain fort connu, comme François Rabelais travesti en Alcofribas Nasier, Noël du Fail en Léon Ladulfi, et même Guillaume des Autelz en Glaomalis de Vezelet. Quant au chevalier de Cailly qui a pris la peine d’intervertir deux lettres de son nom pour publier ses jolies épigrammes sous celui de chevalier d’Aceilly, on ne comprend guère quel espèce de sel un homme d’un esprit aussi délié a pu trouver dans cette insignifiante métamorphose, qui pourroit passer au besoin pour une simple erreur de copiste. La solution de ce problème puéril n’offroit quelque obstacle réel qu’à l’égard de ces littérateurs sans renommée dont la signature la plus explicite auroit conservé