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ANNALES
DE L’IMPRIMERIE DES ALDES ;
Par M. RENOUARD.


Je vous prie de croire que nous ne pouvons guères nous faire idée aujourd’hui de ce qu’étoit un imprimeur, dans les années qui suivirent la découverte de l’art. Pour y parvenir, il faut d’abord se représenter un homme profondément versé dans toutes les bonnes études de son temps ; nourri des langues classiques au point de se les être appropriées comme si elles lui étoient naturelles ; exercé à la lecture des manuscrits, à la comparaison des textes, au choix des variantes, à l’élaboration des scholies, aux modalités des dialectes, aux règles fondamentales et rationnelles des orthographes. Il devra réunir à des notions étendues sur les sciences de l’antiquité, sur les arts, sur les monuments, sur l’histoire, ce tact exquis et rare qui discerne le cachet d’un écrivain original dans une leçon sincère, à des formes de style, à des tours de phrase, à des habitudes d’élocution, à des qualités, à des défauts insaisissables pour le vulgaire. Il sera obligé de voyager de Codex en Codex, de bibliothèque en bibliothèque, de pays en pays, pour collationner un passage douteux, pour éclaircir une difficulté, pour vérifier une conjecture ; et comme aucune capacité humaine ne peut embrasser les spécialités innombrables qui se rattachent à son industrie, il appellera Badius de