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HISTOIRE D’HÉLÈNE GILLET



L’hiver sera long et triste. L’aspect de la nature n’est pas joyeux. Celui du monde social ne l’est guère. Vous craignez l’ennui des spectacles. Vous craignez l’ennui des concerts. Vous craignez surtout l’ennui des salons. C’est le cas de faire chez vous un grand feu, bien clair, bien vif et bien pétillant, de baisser un peu les lampes devenues presque inutiles, d’ordonner à votre domestique, si par hasard vous en avez un, de ne rentrer qu’au bruit de la sonnette ; et, ces dispositions prises, je vous engage à raconter ou bien à écouter des histoires, au milieu de votre famille et de vos amis, car je n’ai pas supposé que vous fussiez seul. Si vous êtes seul cependant, racontez-vous des histoires à vous seul. C’est un autre plaisir encore, et il a bien son prix. J’ai goûté un peu de tout, et je ne me suis jamais réellement amusé d’autre chose.

Mais si vous êtes curieux d’histoires fantastiques, je vous préviens que ce genre exige plus de bon sens et d’art qu’on ne l’imagine ordinairement ; et d’abord, il y a plusieurs espèces d’histoires fantastiques.

Il y a l’histoire fantastique fausse, dont le charme résulte de la double crédulité du conteur et de l’auditoire, comme les Contes des fées de Perrault, le chef-d’œuvre trop dédaigné du siècle des chefs-d’œuvre.

Il y a l’histoire fantastique vague, qui laisse l’âme