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ment de bure, comme leur silencieuse démarche, les apparentait à ces timides animaux des forêts. Elles disposaient les chaises, les lourds chandeliers, les pots de fleurs et les bréviaires dans un ordre rituel et mystérieux, avec une adresse étouffée, immanquable et tendre, mais elles paraissaient néanmoins hésitantes et comme saisies de la crainte de troubler un sommeil auguste, et de faire, par un geste trop accusé, s’écrouler sur elles le poids mystique de l’édifice qu’elles aménageaient en tremblant.

Il est des fleurs qui ne croissent que pour les couvents : fleurs prédestinées qui ont la vocation de l’autel et renoncent aux abeilles pour écouter le léger bourdonnement que fait la voix de l’enfant de chœur. Je n’ai vu ni dans les campagnes, ni dans les jardins, observés par moi avec tant d’amour, mais seulement chez les religieuses Clarisses, ces hautes quenouilles de pétales bleus, cierges d’azur vivant qui s’élançaient au pied des statues de sainte Colette et de