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fin de septembre ; le ciel, voilé, terni et comme résigné, ne conserve de physionomie que ce qu’un visage a de regard encore, les paupières fermées. Au bord du quai le lac palpite ; on sent s’élever en molles buées son liquide azur respirant.

Et aujourd’hui, comme dans mon enfance, j’écoute le silence de l’automne. Rien n’est plus secret ni plus confidentiel. Dans l’espace d’une teinte uniforme, d’un gris velouté qui fascine et apaise, de la terre monte, — tantôt cinglant, tantôt figé, — un froid parfum d’aromates, de fumée et de cristal. Un immense repliement tient courbés et méditatifs les arbres, les feuillages jaunis, l’invisible mêlé à l’atmosphère, et qui rêve en suspens. D’un sage et commun consentement tout se penche, accepte une noble dégradation, car la nature, ayant l’expérience de son éternité, accueille sans révolte ses passagers repos. Il semble que les nymphes d’automne et les anges des campagnes catholiques passent, désormais unis, également innocents et chastes, sur le gazon d’un