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tentation de connaître vos secrets, et ma victoire sur vous. — Vous m’apparaissiez comme une sœur occupée, distraite, débonnaire, qui ne sait pas garder tout son avoir. Votre existence, loin de m’irriter, me soutenait de sa lointaine et ménagère poésie. Que veulent tant de maîtresses exigeantes ? Il me suffisait que celui qui vivait à vos côtés vous eût laissée quelques instants auparavant, et qu’il fût venu. Toute la passion de l’homme tient dans cette résolution, simple, provisoire, difficile, dans ce trajet du devoir au bonheur. — Nous n’avions pas de remords ; notre innocence absolue et méritoire, ce ne pouvait être de renoncer à nous-mêmes, mais c’était de vous aimer.

Si vous, Madame, à présent que vous êtes libre, rencontrez un de ces couples humains où le mariage semble lié à la quiétude heureuse, et que soudain vous vous aperceviez, avec une amère surprise mais une invincible nécessité, que cet homme et vous-même êtes destinés l’un à l’autre, n’exercez pas sur lui votre jalousie, ne faites peser nulle contrainte sur le cœur de l’homme, qui craint toujours instinctivement sa compagne soumise. Veillez au bonheur de la femme tranquille et habituée.

— Certes, elle nous fait souffrir, elle nous apparaît trop privilégiée, celle qui dort auprès