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L’air brûle, la chaude magie
De l’Orient pèse sur nous,
Nous périssons de nostalgie
Dans l’éther trop riche et trop doux.

On entrevoit un jardin vide
Que la paix du soir inclina,
Et là-bas, la mosquée aride
Couleur de sable et de grenat.

La dure splendeur étrangère
Nous étourdit et nous déçoit ;
Je me sens triste et mensongère :
On n’est pas bon loin de chez soi.

Ce ciel, ces poivriers, ces palmes,
Ces balcons d’une rose de fard,
Comme un vaisseau dans un port calme
Rêvent aux transports du départ.

Ah ! comme un jour brûlant est vide !
Que faudrait-il de volupté
Pour combler l’abîme torride
De ce continuel été !

Des œillets, lourds comme des pommes,
Épanchent leur puissante odeur ;
L’air, autour de mon demi-somme,
Tisse un blanc cocon de chaleur…