Page:Noailles - Les climats, 1924.djvu/135

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 125 —

Semble un éclat volant de quelque amphore étrusque.
Sur les murs villageois, le vert abricotier
S’écartèle, danseur de feuillage habillé.
Les parfums des jardins font au-dessus du sable,
Une zone qui semble au cœur infranchissable.
L’air fraîchit. On dirait que de secrets jets d’eau
Sous les noirs châtaigniers suspendent leurs arceaux.
L’hirondelle, toujours par une autre suivie,
Tourne, et semble obéir à des milliers d’aimants :
L’espace est sillonné par ces rapprochements…
Et parfois, à côté de cette immense vie
On voit, protégé par un mur maussade et bas,
Le cimetière où sont, sans regard et sans pas,
Ceux pour qui ne luit plus l’étincelante fête,
Qui fait d’un jour d’été une heureuse tempête !
Hélas ! dans le profond et noir pays du sol,
Malgré les cris du geai, le chant du rossignol,
Ils dorment. Une enfant, sans frayeur, près des tombes,
Traîne un jouet brisé qui ricoche et retombe.
Ils sont là, épandus dans les lis nés sur eux,
Ces doux indifférents, ces grands silencieux ;
Et la route qui longe et contourne leur pierre,
Éclate, rebondit d’un torrent de poussière
Que soulève, en passant, le véhément parcours
Des êtres que la mort prête encor à l’amour…
Et moi qui vous avais délaissée, humble terre,
Pour contempler la nue ou l’âme est solitaire,
Je sais bien qu’en dépit d’un rêve habituel,