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Ô soleil, engourdi par les senteurs du thym,
Parfums de poivre et d’huile épandus sur la plaine,
Rochers blancs, éventés, où, dans l’air argentin,
On croit voir, se gorgeant des flots du ciel latin,
Les rapides Victoires d’Athènes !

Soir torturé d’amour et de pesants tourments,
Grands songes accablés des roseaux d’Aigues-Mortes,
Musicale torpeur où volent des flamants,
Couleur du soir divin qui promets et qui ments,
C’est ta détresse qui me transporte !

Ah ! les amants unis, qui dorment oubliés,
Dans les doux Alyscamps bercés du clair de lune,
Connaissent, sous le vent léger des peupliers,
Le bonheur de languir, assouvis et liés,
Dans la même amoureuse infortune ;

Mais les corps des vivants, aspirés par l’été,
Sont des sanglots secrets que tout l’azur élance.
Je songeais sans parler, lointaine à vos côtés ;
Qui jamais avouera l’âpre infidélité
D’un cœur sensuel, dans le silence !…