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Ô MON AMI, SOUFFREZ…


Ô mon ami, souffrez, je saurai par vos larmes,
Par vos regards éteints, par votre anxiété,
Par mes yeux plus puissants contre vous que des armes,
Par mon souffle, qui fait bouger vos volontés,

Par votre ardente voix qui s’élève et retombe,
Par votre égarement, par votre air démuni,
Que ma vie a sur vous cet empire infini
Qui vous attache à moi comme un mort à sa tombe !

Ô mon ami, souffrons, puisque jamais le cœur
Ne convainc qu’en ouvrant plus large sa blessure ;
Puisque l’âme est féroce, et puisqu’on ne s’assure
De l’amour que par la douleur !