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le port de palerme


Qu’est-ce donc qui troublait cet horizon comblé ?
La beauté n’a donc pas sa guérison en elle ?
Par leurs puissants parfums les soirs sont accablés ;
La palme au large cœur souffre d’être si belle ;
Tout triomphe, et pourtant veut être consolé !

Que signifient ces cieux sensuels des soirs tendres ?
Ces jardins exhalant des parfums sanglotants ?
Ces lacets que les cris des oiseaux semblent tendre
Dans l’espace intrigué, qui se tait, qui attend ?

— À ces heures du soir où les mondes se plaignent,
Ô mortels, quel amour pourrait vous rassurer ?
C’est pour mieux sangloter que les êtres s’étreignent ;
Les baisers sont des pleurs, mais plus désespérés.

La race des vivants, qui ne veut pas finir,
Vous a transmis un cœur que l’espace tourmente,
Vous poursuivez en vain l’incessant avenir…
C’est pourquoi, ô forçats d’une éternelle attente,
Jamais la volupté n’achève le désir !