Page:Noailles - Les Vivants et les Morts, 1913.djvu/134

Cette page a été validée par deux contributeurs.
134
les soirs du monde


J’ai, parmi les gradins bleuâtres,
Vu le soleil et ses lions
Mourir sur l’antique théâtre,
Ainsi qu’un sublime histrion ;

Et comme j’ai du sang d’Athènes,
À l’heure où la clarté s’enfuit,
J’ai vu l’ombre de Démosthène
Auprès de la mer au doux bruit…

— Mais ces mystérieux visages,
Ces parfums des jardins divins,
Ces miracles des paysages
N’enivrent pas d’un plus fort vin
Que mes soirs de France, sans bornes,
Où tout est si doux, sans choisir ;
Où sur les toits pliants et mornes
L’azur semble fait de désir ;
Où, là-bas, autour des murailles,
Près des étangs tassés et ronds,
S’éloigne, dans l’air qui tressaille,
L’appel embué des clairons…