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L’AVENIR


Ô Terre, que partout l’amour enfin se pose !
Que tous les continents aient un même souhait,
Comme trente parfums font une seule rose,
Comme chaque rameau fait la verdeur de Mai.

Que chacun ait un fruit de la terre promise,
Et que dans l’air neigeux les dômes de Moscou
Aient la fierté dorée et libre de Venise,
Qui de joug n’a gardé que des perles au cou !

Que les soldats sacrés, qu’Achille, qu’Alexandre,
Voyant comme il fait sombre et triste chez les morts,
Disent : « Louez la vie et pleurez sur la cendre !
Hélas ! ne plus vous voir, Soleil ! Œil du jour d’or ! »

— Émouvante bonté, touchant désir de plaire
Qu’auront, d’un bord du monde à l’autre, tous les cœurs,
Quand amoureux d’un rêve immense et populaire
Les héros ne seront que de douleurs vainqueurs !

Puissance de la voix lyrique, tu pénètres
L’ombre où l’homme respire un air étroit et noir,
Et tu feras jaillir, dans toutes les fenêtres,
La lumière, que Gœthe, en mourant, voulait voir !