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LA PATRIE

— Alors qu’eux à jamais seront exclus du sort, —
La Patrie, ineffable et mystique harmonie :
Royauté des vivants, éternité des morts !

Patrie indéniable, exigeante Patrie !
Vaste précision, éparse et sans contour :
Un mot, un long passé d’Histoire, une prairie
Où, enfant, l’on pensait : « C’est ici tout l’amour !
C’est ici l’univers ! » Patrie, un mot qui prie.
Qui enjoint, qui commande, et veut bien expliquer
Lentement, fortement, d’une voix mâle et sûre.
Malgré le grand péril de son sol attaqué,
Qu’elle a dû recevoir, non faire, la blessure.
Qu’à l’humaine bonté elle n’eût point manqué.
Elle qu’un cri plaintif de tout humain arrête
Et qui penche vers lui sa gourde emplie d’azur…

Patrie, âme évidente et pour chacun secrète,
Qui n’est pas seulement le terrain libre et pur,
Mais qui, dimension plus haute et plus sensible,
Étend jusques aux cieux ses sommets invisibles !
— Qui de nous, quand son œil sur la nuit se posait,
N’a cru voir luire un ciel et des astres français ?
Qui de nous, sur le bord des mers orientales.
Quand la beauté des jours pense nous asservir.
N’a langui de désir vers la terre natale
Où même le tombeau semble un long avenir ?