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LA MORT DE JAURÈS

III



Vous étiez plus vivant que les vivants, votre air
Était celui d’un fauve ayant pris pour désert
La foule des humains, à qui, pâture auguste,
Vous offriez l’espoir d’un monde éfral et juste.
Vous ne distinguiez pas, tant vos feux étaients forts,
L’incendie éperdu que préparait le sort.
Vos chants retentissaient de paisibles victoires…
— Alors, la Muse grave et sombre de l’Histoire,
Ayant avec toi-même, ô tigre de la paix,
Composé le festin sanglant dont se repaît
L’invisible avenir que les destins élancent,
Perça ta grande voix de sa secrète lance
Et fit tonner le monde au son de ton silence…

Août 1914.