Page:Noailles - Les Forces éternelles, 1920.djvu/157

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
149
MÉLODIE MATINALE

Qui palpitent avec des invisibles ailes,
Ni le bonheur léger du vent frais et mouillé
N’avaient fait tressaillir mon songe émerveillé !
Mais ce cri délicat, cette acide étincelle,
Ce verbe jaillissant, ce doux chant ébahi
Épandait jusqu’aux cieux une âme universelle…

— Et je songe à la voix, aux choses que tu dis,
À l’enivrant péché du désir qui s’exprime ;
Sans doute la parole était au paradis
Le fruit mystérieux, plein d’espoir et d’abîme,
Qui fit le couple humain à jamais triste et fier.
— Je songe, ce matin, dans la tiède atmosphère,
À la Musique avec ses cris dans le désert,
Aux sanglots, aux baisers, à tout ce qui libère
Le grand gémissement du rêve dans la chair…