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LE FLOT LEGER DE L’AIR…


Tout bruit léger, lointain, se distingue si fort
Dans le globe bleuâtre où tout s’enlise et dort,
Que l’esprit qui songeait se réveille et sursaute
Au grincement d’un char se hissant sur la côte,
Au sifflement du pré parcouru par la faux :
Bruits furtifs, amortis, mais que l’azur recueille,
Comme un herbier retient les fins signaux des feuilles…

— J’aime jusqu’aux douleurs qu’inflige un jour si beau,
Jusqu’à cette asphjTfie éparse qui bâillonne
Le souffle des passants sur qui midi rayonne.
— Divinité fougueuse et calme du beau temps ! —
La même paix bénit la campagne et la ville,
Profondeur d’océan dans l’espace, et pourtant
Je ne sais quoi de pur comme un ruisseau tranquille.
Tout est pourvu, tout est complet, tout est content.
Le bonheur, le malheur sont tous les deux distants ;
Je n’imagine rien, je ne veux rien, j’attends…