Page:Noailles - Les Éblouissements, 1907.djvu/390

Cette page a été validée par deux contributeurs.
385
LE REPROCHE AUX DIEUX

Ô mes dieux ! et, le front pour vous seuls incliné,
J’étais comme une enfant au regard étonné…
Mais puisqu’il vous a plu d’appesantir dans l’ombre
Votre bras sur mon cœur d’où monte un cri sans nombre,
Puisqu’il vous plaît de voir qu’aux larmes je m’abaisse
Moi, nymphe, moi danseuse agile, moi prêtresse,
Puisqu’il vous est, mes dieux, agréable et charmant
Que je sois comme un arbre orageux et dément,
Et que ne trouvant pas d’humain pareil à moi,
Je sois seule au milieu du plus pressant émoi,
Ah ! laissez qu’étendant mes doigts vers un beau livre
Quand je n’ai plus le goût ni la force de vivre,
Je sente se poser sur ma poitrine amère
La grave main d’Eschyle et du divin Homère…