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CONSTANTINOPLE


J’ai vu Constantinople étant petite fille,
Je m’en souviens un peu,
Je me souviens d’un vase où la myrrhe grésille
Et d’un minaret bleu.

Je me souviens d’un soir aux Eaux-Douces d’Asie :
Soir si traînant, si mou,
Que déjà, comme un chaud serpent, la Poésie
S’enroulait à mon cou.

Une barque passa, pleine de friandises,
Ô parfums balancés !
Des marchands nous tendaient des pâtes de cerises
Et des cédrats glacés.

Une vieille faisait cuire des aubergines
Sur l’herbe, sous un toit,
Le ciel du, soir était plus beau qu’on n’imagine,
J’avais pitié de moi.