Page:Noailles - Les Éblouissements, 1907.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

BONDISSEMENT


Laissez-moi m’en aller, l’azur est comme une eau,
L’espace a la couleur joyeuse des jonquilles,
Le pin met des fils d’or dans ses vives aiguilles,
Les chemins éblouis montent sur le coteau !

Laissez-moi m’en aller, les abeilles m’attendent,
Je vois déjà là-bas-le frêne le plus gai
Me faire signe avec son feuillage laqué,
Et le saule onduleux me jette ses guirlandes.

Les bosquets sont chantants, le pré vert est gonflé,
La chaleur du matin sur le platane arrive,
La colline est paisible, et semble être la rive
De l’azur, frémissant et joyeux lac ailé…

Avec les yeux, les mains, les bras-ouverts, tout l’être,
Je veux aller toucher le sucre humide et bleu
De l’espace, où, nouant et dénouant leur jeu,
Les oiseaux enivrés s’élancent et pénètrent.