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DÉLIRE D’UN SOIR D’ÉTÉ


Je vous adore, ô soir dont la blancheur me crible
De rayons mats et doux !
Onde mélancolique, adagio terrible,
Soir lointain, soir hindou,

Soir qui faites songer, par l’argentine braise
De votre passion,
À l’aube vénéneuse, à l’effrayant malaise
De la création.

Soir aux parois de lisse et laiteuse faïence,
Veilleuse au mol éclat,
Qui remplit de pensive et pâle défiance
Les branches du lilas.

Soir de gardénia, soir couleur de fontaine
Chantant dans le sérail,
Douceur d’Anatolie, arche triste et hautaine,
Mosquée en blanc corail.