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JARDIN AU JAPON


Ô beau visage ovale et moite de l’été,
Au milieu du silence et des champs arrêté !
– L’azur luit, l’univers soupire de mollesse,
L’immense oppression des choses monte et baisse,
L’espace est de soleil et d’amour épuisé,
L’indolente journée a ses genoux croisés.
La tortue assoupie erre sur la rocaille
Où le ruisseau bondit sur sa pesante écaille ;
Une servante rôde et prépare le thé
Dans un kiosque léger comme un chapeau natté.
C’est une délicate et suave besogne.
Sur les murs de papier, l’ombre de la cigogne,
Du papillon volant et du vert oranger
Tremble comme un tableau sous un zéphir léger…
Ah ! vivre quelques jours dans ces minces demeures,
Aux branches du prunier, voir s’égoutter les heures,
Errer dans les chemins poudrés de sable doux ;
Les figuiers accroupis nous viendraient aux genoux,