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LES PINS REFLÈTENT LES CYPRÈS


Et l’abeille remonte au ciel
Avec un doux bruit de rouage,
Comme si, sur des rails de miel,
Elle faisait ce beau voyage !

Tout est brûlant, tendre, éclaté,
Tout bourdonne, s’ébat, s’incline.
Ô divin roulis de l’été !
Mon cœur fond comme la résine.

Je ne vois plus rien, je me meurs.
Cris d’oiseau dans les graminées,
Silence’bercé de rumeurs,
Ô vertige des matinées !

Repos abondant, dilaté
Tout bleuit dans ta douce haleine,
Paisible et brève éternité
D’un matin en feu sur la plaine…

Et c’est soudain un calme immense, mol, uni,
Où rien ne tressaille et ne passe ;
Il semble qu’il n’y ait dans le jeune infini
Que mon bonheur et que l’espace…