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VENISE

Des oiseaux étendaient leurs corps charmants et plats.
L’azur était léger, la terre était puissante,
Les troupeaux allongeaient leurs ombres innocentes…
Et maintenant, je vois avec un sombre effroi
D’autres êtres aller se meurtrir comme moi,
D’autres aller là-bas, où, dans la nuit divine,
On entend les bateaux qui partent pour Fusine ;
D’autres aller pleurer d’ardeur, de désespoir,
Dans l’éblouissement du marbre rose et noir,
D’autres vouloir sans peur presser sur leur corps tendre
Le plaisir qu’il ne faut pas voir et pas entendre,
D’autres, hélas ! vouloir aimer, toucher, goûter,
La ville que mon cœur n’a pas pu supporter…