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LA MAISON DE SYLVIE A CHANTILLY


Après la longue allée où l’Été vert s’élance,
Voici, frappés des flots du rêve et du silence,
La maison, la terrasse et les étangs voisins…
– Ô Sylvie aux yeux noirs, Félice des Ursins,
C’est ici que sur l’herbe ou dans la salle ronde
Vous avez vu passer aussi les jours du monde !
C’est ici que, songeuse ou triste comme nous,
Vous laissiez s’alanguir vos mains sur vos genoux ;
C’est ici que parfois sensible et pathétique
Pour un peu de parfum, de vent ou de musique,
Vous éprouviez ce mal, ce bien, ce chaud, ce froid,
Ce besoin d’échapper à votre corps étroit,
Qu’ont sur toute la terre, au soir, les jeunes femmes…
L’air charmant fut sur vous comme il est sur nos âmes.
Vous eûtes quelquefois, dans ces chemins dolents,
L’ennui divin des jours trop chauds, des soirs trop lents,
Vous alliez, vous veniez, vous repoussiez la porte.
Vous êtes comme moi, quoique vous soyez morte ;