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LE POÈME DE L’ILE-DE-FRANCE


Sous les arbres feuillus qu’un peu de vent agite,
Le petit jour éclot, dans le sable vermeil,
Comme un lièvre inquiet glisse hors de son gîte,
Peureux, le cœur timide et les yeux en éveil.

La pelouse est soudain comme une longue joie,
Comme un brûlant miroir et comme un vert étang
Où l’ombre des tilleuls se renverse et se noie,
Où le vol de la pie et du ramier s’étend.

Les labours ont le ton charmant des roses sèches
Et font briller au loin leur océan moelleux,
Le soleil du matin monte au ciel, se dépêche ;
On voit glisser dans l’air un petit faucon bleu.

Sous le poids des frelons tout l’herbage remue,
Je suis là, j’ai sur moi l’herbe des prés stridents ;
Caresse de verdure au bord de l’âme émue,
Plaisir qui naît aux pieds et qui va jusqu’aux dents !