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SOLITUDE


Je suis là, sur le balcon sombre,
Tout l’univers nocturne luit ;
Si petite et perdue en lui,
Mon cœur pourtant parfume l’ombre.

Je regarde ce qui était
Avant que je ne fusse née ;
Mon âme inquiète, étonnée,
Contemple et rêve tout se tait.

Lune d’argent ! son doux génie
Qui m’émeut tant ne me voit pas,
Nul ne m’entend chanter tout bas,
C’est la solitude infinie.

C’est le large et sombre désert
Sous le réseau des lois immenses,
Le cœur sent rôder la démence,
Le vent du sud glisse dans l’air.