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LA JOURNÉE HEUREUSE

L’odeur du blé nombreux se lève de la terre,
Le jour est abondant et pur, l’air désaltère
Comme l’eau que l’on boit à l’ombre dans les puits,
Le jardin se repose, enfermé dans son buis…
— Ah ! moment délicat et tendre de l’année,
Je vais vous respirer tout au long des journées
Et presser sur mon cœur les moissons du chemin :
Je vais aller goûter et prendre dans mes mains
Le bois, les sources d’eaux, la haie et ses épines ;
— Et, lorsque sur le bord rosissant des collines
Vous irez descendant et mourant, beau soleil,
Je reviendrai, suivant dans l’air calme et vermeil
La route du silence et de l’odeur fruitière,
Au potager fleuri, plein d’herbes familières,
Heureuse de trouver, au cher instant du soir,
Le jardin sommeillant, l’eau fraîche, et l’arrosoir…