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LA DOMINATION

et des positions qui le dégoûtent de ces timides créatures… Hélas ! soupirait Antoine Arnault, ils sont les êtres du monde qui ont le moins de génie, le moins d’ivresse et de sensibilité, et ce qui se presse autour d’eux, ce qui les entoure et baise l’ombre de leur voiture, ce qui s’écrase contre leur frêle poitrine bariolée, c’est de l’amour, et l’amour des mâles, plus enivrant que les pleurs des femmes passionnées. Être le groupe et l’unité, la nation et le maître de la nation, être celui en qui est incluse la sainte beauté de son siècle, la découverte du chimiste, le chant du poète et du musicien ! être celui dont on pourrait dire : « Il a Beethoven, il a Byron ou Raphaël !… » Ah ! puissance que j’exècre et que j’adore, que je repousse et dont je suis insatiable, ne vous connaîtrai-je point un instant, et, ivre de domination, ne sentirai-je pas s’abattre et se pâmer la Marseillaise sur mon cœur ?