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pourtant les émotions des autres hommes. Et le sentiment chaste que Sabine éprouvait pour lui se déchirait voluptueusement, s’irritait de fièvre et de sang comme une égratignure.

Assise auprès du piano, entre Jérôme et Marsan, moins attentive qu’elle ne semblait l’être, elle écoutait et approuvait ; mais du fond de sa vie, elle s’adressait en pensée au jeune homme et lui disait en son cœur : « Qu’importe, vous avez un génie délicieux, mais qu’importe, laissez cela, ce n’est pas pour cela que je vous aime… C’est en toute chose que vous êtes plus beau et plus fort et plus riche que tous les autres. Votre talent n’est qu’un moment de votre merveilleuse harmonie… Que vous viviez et que je vous aie rencontré, quelle douceur !… Ah ! vous voyez bien comme en ce moment tout de vous me fait mal. »

L’heure de rentrer chez elle étant venue, madame de Fontenay exprima à Eugène Marsan le plaisir qu’elle aurait à le voir chez elle, quand il voudrait venir, et, se tournant vers Jérôme, elle lui dit au revoir avec cet air d’indifférence qu’elle essayait de prendre en présence d’