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s’amuser, des désirs d’une sentimentalité enfantine et tendre.

Elle disait à son mari : « Aujourd’hui, nous allons au théâtre, moi avec vous, tout seuls, et nous ne le dirons pas à Marie. »

D’autres fois, elle obligeait Henri à rester avec elle au bord de la fenêtre, le soir, sous la lune ; et, la tête collée à l’épaule de son mari, dans la pose de l’alanguissement et du soupir, elle essayait qu’il fût, comme elle, empli d’une mélancolie indécise.

Elle disait aussi, s’obstinant à le vouloir pareil à elle : « Sentez-vous comme le soir a cette couleur de silence et de fumée qu’on voit au ciel de bataille dans les panoramas ?… C’est si triste, et j’adore cela. »

Elle ajoutait : « Quand tout est beau comme maintenant, je voudrais pleurer, et vous ? »

Lui pas. Il lui disait gentiment qu’elle était folle, qu’elle pouvait prendre froid, qu’elle lisait trop de livres futiles, qu’il l’aimait beaucoup, qu’elle le savait bien, qu’elle allât se coucher.

Obstinée dans sa besogne de tendresse amollie, Sabine boudait, ne parlait pas pendant quelques jours,